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L'AFFAIRE "TABAC": VICISSITUDES DE LA CREATION LITTERATURE A L'HEURE DU REALISME SOCIALISTE EN BULGARIE Marie Vrinat-Nikolov En 1951, soit sept ans après l'instauration du régime communiste en Bulgarie, sort le roman Tabac, écrit par Dimităr Dimov, écrivain qui s'est déjà fait connaître par deux romans. Nous sommes en pleine période stalinienne et l'idéologie officielle qui règne, en littérature, est le réalisme socialiste. Au nom, notamment, des principes esthétiques de Ždanov1, en Union soviétique mais aussi dans la Bulgarie du docile Vălko Červenkov, on enferme dans les camps, on déporte ou l'on réduit au silence nombre d'écrivains soupçonnés de sortir des ornières strictement tracées par le réalisme socialiste et de servir des intérêts et des idées "étrangers", donc "ennemis". Armés de ces principes, particulièrement zélés parce que craignant pour leur pain, voire pour leur vie, envieux lorsqu'apparaît un véritable talent, écrivains et critiques officiels, dans leur majorité, rivalisent de blâmes, de reproches et de désaveux pour rejeter, lors de discussions officielles sans fin, cette œuvre de Dimov. Suit alors un scandale aux multiples rebondissements que nous analyserons plus tard. Cette affaire, demeurée dans les mémoires des contemporains mais dont les archives avaient été soigneusement "rangées", a pu refaire surface depuis la chute du régime totalitaire en Bulgarie, en novembre 1989. Nous disposons maintenant de toutes les pièces: du premier roman (la version originelle et - on peut même l'affirmer - originale)2 durant quarante ans impossible à trouver; de la seconde édition de ce roman remanié par l'auteur contraint et forcé en 1953-54, seule version officielle et disponible durant longtemps; enfin des archives aussi passionnantes, édifiantes que précieuses de toute l'affaire, publiées récemment par les soins d'Albert Benbasat et d'Anna Svitkova3. Une lecture attentive du dossier montre qu'avec Tabac, nous avons un exemple manifeste de roman qui échappe à son auteur (on verra comment l'idéologie officielle se l'est approprié et l'a analysé à travers le prisme déformant des clichés politiques de l'époque et de la langue de bois qui allait de pair, faisant de cette œuvre "un instrument puissant de notre lutte", "la gloire de notre littérature"), et d'histoire qui échappe au roman (puisque l'auteur doit se plier aux "conseils" - c'est-à-dire aux directives - et remanier son roman en amplifiant notamment tout ce qui a trait aux héros communistes et à leur lutte). Bref, ce qu'il est particulièrement intéressant de suivre, dans ce cas précis et grâce au recul de l'histoire, c'est le moment où un scandale littéraire devient une affaire idéologique soigneusement enregistrée et orchestrée.
Le réalisme socialiste en Bulgarie dans les années 50 Lorsque, le 9 septembre 1944, l'armée soviétique fait une entrée triomphale en Bulgarie pour soutenir le coup d’Etat monté par les forces politiques du Front de la Patrie4, elle marque le début d'une "ère" qui devait durer près de cinquante ans pour le pays, ses habitants et sa littérature.Peu à peu, la dictature s'instaure: plusieurs écrivains sont tués (Rajko Aleksiev, Boris Rumenov et autres) ou envoyés dans les camps: Talev, Fani Popova-Mutafova, Damjan Kalfov, Jordan Vălčev, pour ne mentionner que les plus connus. L’université bulgare est purgée de ses "éléments bourgeois", des dizaines d’écrivains sont exclus de l’Union des Ecrivains, d’autres se voient interdir l’accès à l'édition. Les propriétaires des grandes maisons d’éditions ("Xemus", "Fakel", "Xr. G. Danov"), reviennent, après les évacuations dues aux bombardements de Sofia. Ils reprennent leur travail dans de dures conditions (économie bouleversée, censure, contrôle du pouvoir sur les publications). C’est l’époque de la création des éditions communistes: Partizdat, Narizdat, Profizdat aux noms peu imaginatifs. Toutes les revues littéraires des années 20-30 sont suspendues. D’autres cercles se créent mais avec l’inévitable présence d’un représentant du Parti Communiste: il imprime la ligne idéologique que doivent respecter les écrivains. L’organisation des écrivains communistes prend en mains la revue Literaturen Front. Le 23 décembre 47, c'est la nationalisation des éditions privées et la fin des espoirs d’une vie littéraire libre. L’Union des Ecrivains, fondée spontanément en 1913 et demeurée indépendante durant des décennies, devient une organisation docile aux mains du Parti; elle a le premier rôle dans l’application de la politique officielle du Parti Communiste bulgare dans la vie littéraire. On entre dans la période du culte de la personnalité, entre 1948 et 1955, et la littérature bulgare chante la gloire des "numéro un" successifs, Georgi Dimitrov et Vălko Červenkov, l’édification du socialisme, les TKZS (variante bulgare des kholkozes), le plan quinquennal, les partisans et les îlotiers, bref, c'est ce qu’on appelle "brigardirska poezija". D’un autre côté, on interdit le lyrisme et l’amour en littérature, les romans policiers, les traductions de la littérature européenne. C'est donc une période de réalisme socialiste triomphant. On en trouve une définition édifiante et quelque peu tautologique sous la plume du "philosophe" Todor Pavlov (1955): "L’art, aujourd’hui, eu égard aux conditions et aux tâches qui sont les nôtres, est et doit être profondément et jusqu’au bout un art de classe et de Parti ou, plus exactement, socialiste-réaliste, c’est à dire pas seulement réaliste mais aussi socialiste, et pas seulement socialiste mais aussi réaliste."5 Ou encore de la part du futur numéro un, Todor Živkov (1958): "Car [le réalisme socialiste] est la méthode permettant de recréer la réalité du point de vue de la théorie la plus progressiste: le marxisme-léninisme, car c'est uniquement de ce point de vue que l'on peut, aujourd'hui, dévoiler et refléter toute la véracité de la vie dans une œuvre artistique, que l'on peut dévoiler et montrer non seulement les phénomènes extérieurs mais aussi les forces qui les meuvent, leur sens profond intérieur et la tendance de leur développement. Car le réalisme socialiste permet le plein épanouissement de tous les types et genres de la littérature et de l'art, il permet une riche variété de styles, de sujets et de thèmes, la manifestation la plus complète des facultés et talents créateurs ainsi que de la maîtrise artistique, de l'individualité, des élans, des recherches et des audaces du créateur. Le réalisme socialiste s'approprie et développe d'un point de vue critique tout ce qui est précieux et progressiste des méthodes artistiques du passé, il a hérité le meilleur aussi du réalisme critique. Mais maintenant, vu les nouvelles conditions, à une époque où il faut éduquer les travailleurs dans l'esprit du socialisme, inculquer une morale communiste, les vieilles écoles réalistes ne sont pas suffisantes."6 Réalisme socialiste, que n'a-t-on pas dit en ton nom... La consultation des archives du journal Literaturen Forum, organe officiel de l'Union des Ecrivains bulgares jusqu'en 1989, est tout à fait édifiante et instructive, elle permet d'aboutir aux mêmes conclusions que Michel Aucouturier dans un ouvrage récent sur le réalisme socialiste: "Il faut établir ici une distinction entre le contenu de la doctrine et sa fonction: si le premier est défini en termes assez vagues, et souvent problématiques, la seconde, elle, est parfaitement claire: la référence à la "réalité dans son développement révolutionnaire" et à "l'éducation idéologique des travailleurs dans l'esprit du socialisme" sous-entend, sinon l'adhésion formelle au parti communiste, du moins l'acceptation de ses postulats idéologiques et de son autorité politique."7 Tel qu'il apparaît dans Literaturen Forum, le réalisme socialiste est effectivement une doctrine pauvre du point de vue du contenu esthétique, qui existe principalement par sa fonction exemplaire et éducatrice. En témoignent quelques titres parmi tant d'autres presque identiques: "Poètes qui grandissent dans les usines", "Créons des œuvres d’art pour nos sportifs", "Le peuple - héros de la littérature !", "Lutte pour le réalisme", "La classe ouvrière: thème principal", "La vie: âme de la littérature", "Luttons pour le réalisme socialiste !", etc., etc. Les maîtres mots et expressions de la période sont "réalisme", "Parti", "peuple", "lutte", "contre la décadence occidentale et l’esprit bourgeois", "donner l’exemple", "refléter la vie", "thème contemporain". On est frappé, dans le style des articles, par l'abondance de futurs et de modalités de devoir (il faut que la littérature...; la littérature doit...; la littérature sera...). Ainsi, sous la plume d’Ivan Ruž concernant la qualité artistique d'une œuvre (1947): "Pour se faire, il est indispensable que l’auteur d’une œuvre soit près de la réalité, qu’il entretienne des contacts étroits avec elle, qu’il connaisse la vraie vie, la vraie société, qu’il apprenne à connaître ce qui caractérise principalement les contradictions et les luttes sociales (les forces motrices) qui remplissent l’histoire humaines depuis les temps les plus reculés: luttes entre hommes libres et esclaves, luttes entre suzerains et serfs (au Moyen Age), entre capitalistes et exploités (sous le capitalisme), qu’il reflète la fin inéluctable des classes exploitantes..." C'est dans ce contexte qu'éclate "l'affaire Tabac".
Tabac: une affaire littéraire... En 1951, lorsque sort Tabac (roman volumineux de quelques six cents pages), son auteur, Dimităr Dimov, professeur de médecine vétérinaire à l'université de Plovdiv puis à Sofia, qui a parfait ses études à Madrid durant la seconde guerre mondiale, intellectuel délicat et passionné par le biologique en l'homme, est déjà bien connu des milieux littéraires et des lecteurs: en 1938, il publie Le lieutenant Bentz et, en 1945, Les âmes condamnées, roman qui a pour trame la guerre d'Espagne. Tabac sort enfin aux éditions "Narodna Kultura" après avoir été refusé par les très officielles "Bălgarski pisatel", mais il est tiré à seulement 4000 exemplaires (rappelons-nous les énormes tirages de l’époque, dont la proportion n’avait rien à voir avec le véritable marché). C'est immédiatement un grand succès: le public se l'arrache littéralement. Il est bien difficile de résumer en quelques lignes cette œuvre riche en personnages et en péripéties: elle décrit l'ascension rapide et incroyable du jeune Boris Morev, issu d'une famille très pauvre, qui monte à la tête de l'une des plus grandes entreprises de tabac, Nicotiana, grâce à son intelligence froide et à son manque de scrupules. Autour de lui gravitent sa femme, Maria, fille du directeur de l'entreprise auquel il succède, jeune femme intelligente et délicate aux nerfs malades, condamnée à une mort prématurée; Irina, étudiante en médecine aussi intelligente que belle, qui, après avoir été repoussée par Boris en quête de la fortune et du pouvoir, devient sa maîtresse puis sa femme à la mort de Maria, mais qui finira par se perdre dans le milieu de la grande bourgeoisie pervers et condamné dans lequel Boris Morev la fait entrer; l'expert Kostov, esthète fin, un peu snob et tourmenté par la conscience de sa richesse en même temps que du déclin inéluctable du monde de la grande bourgeoisie auquel il appartient, et qui, pour se "racheter", fait preuve d'une philanthropie aussi vaine que déplacée; Von Gaier, nazi, musicien, très cultivé, aristocrate dans l'âme, persuadé de la suprématie de l'Allemagne (il faut bien le reconnaître, le personnage ressemble assez au cliché répandu du nazi cultivé et barbare). De l'autre côté de cette barrière de l'argent se trouvent les ouvriers de Nicotiana, dont le tabac ronge impitoyablement la santé, Max Eshkenazy, intellectuel juif qui se nourrit de la lecture de Marx et d'Engels, les deux frères de Boris Morev, Stéphane et Pavel, communistes qui affrontent jusqu’au bout leur frère, et, parmi les autres militants de la lutte ouvrière, la jeune Barbara au militantisme fanatique et effrayant. Le traitement des personnages révèle, chez Dimov, un intérêt certain et passionné pour la psychologie humaine, pour les grandes lois biologiques qu'il se plaît à étudier dans l'être humain (on retrouve sans doute les influences des théories freudiennes). Ce roman est donc une fresque de la situation politique et sociale de la Bulgarie des années trente à quarante-quatre, époque de tensions et de conflits sociaux, marquée par la montée clandestine du parti communiste, par une présence politique et économique allemande de plus en plus forte, par la guerre aux côtés de l'Allemagne, la fin d'un monde, celui du capitalisme en construction et de la bourgeoisie, avec l'entrée des troupes soviétiques qui marque, peut-on dire schématiquement, l'avènement du pouvoir communiste, le 9 septembre 1944. Sur cette trame historique qui évoque le drame d'une nation se déroule en parallèle un drame particulier: l'intrigue complexe de l'amour entre Irina et Boris, d'abord passionné puis peu à peu gâté et refroidi par l'argent et le pouvoir, l'ascension de Boris, qualifié de "Rastignac" bulgare par le critique Svetlozar Igov8, puis sa déchéance et sa mort. Sans entrer dans les détails d'une analyse poussée, il est certain qu'un lecteur contemporain est parfois agacé par le souci de "psychologisme" poussé à l'extrême mais encore mal dominé, cause de certains traits un peu manichéens ou caricaturaux (notamment dans le portrait de Von Gaier ou de la courtisane Zara); mais si l'on prend en considération l'histoire et l'évolution du roman bulgare (le premier grand roman, Sous le Joug, d'Ivan Vazov, ne date que de 1890 et longtemps, le réalisme domine...), c'est assurément une œuvre à la portée majeure par son ampleur, le traitement complexe de l'histoire immédiate et des personnages, une œuvre qui marque un tournant dans la littérature bulgare. Les lecteurs contemporains de l'œuvre ne s'y sont d'ailleurs pas trompés. Je citerai, à titre d’exemple, la réaction de Zdravko Dafinov, ancien officier du tsar Boris III, réprimé par le régime et reconverti par les circonstances en bibliothécaire, dont les mémoires (précieux, car ils couvrent la période 1913 à nos jours) ont été publiés depuis 1998 seulement9: "16 mars 1951. J’ai lu avec un grand plaisir esthétique le livre de Dimităr Dimov, Tabac. Voici qu’est paru enfin chez nous aussi un vrai auteur de romans doué de talent ! Sa maîtrise de l’écriture avait déjà produit sur moi une forte impression lorsque j’avais lu, il n’y a pas longtemps, son roman "espagnol" Les âmes condamnées. Dans Tabac, cependant, il atteint un succès encore plus grand, par la composition générale de son œuvre, les personnages bien campés, leur psychologie, la narration menée avec maîtrise et l’évocation réussie de l’époque où se passent les événements décrits. Bravo ! Bravo aussi à la Bulgarie qui, bien que communiste, a produit un tel talent, un tel maître du roman psychologique (...)"10. Dès ses débuts, ou plutôt avant même ses débuts, Tabac se heurte à plusieurs obstacles: il devait être publié par les éditions "Bălgarski pisatel" qui, peu avant sa sortie, le refusent; les éditions "Narodna Kultura" acceptent de l'éditer et demandent à Pantelej Zarev, critique littéraire aussi officiel qu'incontesté, de se charger du compte-rendu du roman. Ce dernier met bien du temps à rendre son verdict (août 1951): s'il reconnaît plusieurs qualités à l'œuvre (talent de peintre, maîtrise de la langue et du style, peinture de "la domination capitaliste en Bulgarie" et de "la lutte de la classe ouvrière et du peuple pour vaincre le capitalisme et le fascisme"), il déplore néanmoins la prédominance des héros issus de la bourgeoisie mieux dépeints que ceux du monde ouvrier et occupant une place centrale dans le roman, ce qui (sic !) témoigne d'une influence de la littérature bourgeoise sur l'écrivain. L'auteur concluait ainsi: "Le roman pourrait être édité tel qu'il est mais les erreurs mentionnées seront sûrement relevées par notre critique et taxées de défauts de l'œuvre, qui en amputent sérieusement la valeur littéraire et idéologique." C'est donc une critique mitigée, en des termes qui préfigurent ce qui sera un peu plus tard une véritable langue de bois. D. Dimov n'a ni le temps ni l'envie de remanier son roman: celui-ci sort donc tel qu'il est, en automne 1951, tiré uniquement à 4000 exemplaires qui sont vendus en un temps record. Mais l'affaire ne commence véritablement qu'avec les nombreux jours de débats et de discussions menés au sein de la très officielle Union des Ecrivains (27 et 30 janvier, 8, 11 et 13 février 1952), où l'on devait examiner quelles œuvres, sorties en 1951, méritaient le prix le plus prestigieux de l'époque, le prix Dimitrov. On peut juger de la qualité hautement littéraire des critères, rappelés en début de séance par l'écrivain Pavel Vežinov: "L'insigne honneur de ce prix ne doit être accordé qu'aux écrivains qui se sont le plus distingués, qui ont contribué par quelque chose de nouveau ou d'important au développement de notre littérature, qui ont répondu par des œuvres de valeur aux importantes tâches exposées aux écrivains lors du 5e congrès du Parti: avant tout, représenter les efforts héroïques de la classe ouvrière pour l'édification du socialisme chez nous, ainsi que les grands changements survenus dans les campagnes bulgares jusqu'à ce jour."11 Dans l'ensemble, la lecture des nombreux exposés (environ une dizaine d'écrivains et de critiques prennent la parole, seulement trois défendent le roman sans réserve) laisse une impression navrante: si l'on ne peut parler de langue de bois à proprement parler, on est frappé par le caractère superficiel, schématique et répétitif des critiques émises, calquées sur l'idéologie, où la littérature est complètement perdue de vue. Ce qui est reconnu comme positif, dans l'œuvre, c'est la dénonciation du capitalisme, de la décadence bourgeoise, le talent plastique de l'auteur "doué d'une pensée figurative"... mais les blâmes pleuvent littéralement: "C'est une langue insupportable (...) l'auteur a un talent incontestable mais il ne maîtrise pas partout sa matière. " Ou encore: "Nous avons là un talent incontestable (...) mais aussi une méthode erronée, sous l'influence de la littérature décadente (...) Il faut aider l'auteur en lui adressant une critique objective, afin qu'il surmonte les tendances anti-réalistes de son œuvre." Bref, si l'on récapitule ce qui est reproché à Dimov, c'est d'une part de ne pas servir suffisamment l'idéologie officielle en accordant le premier rôle aux héros "négatifs", en reléguant au second plan les luttes ouvrières et le rôle du Parti communiste et en subissant l'influence de littératures bourgeoises et décadentes (les auteurs préférés de Dimov, si l'on en croit les mémoires de sa femme, Nelli Dospevska, étaient Balzac, Stendhal, Flaubert et Maupassant et pour les lire en langue originale, il avait appris le français); d'autre part de ne pas soigner sa langue qui témoigne d'influences étrangères; enfin, de trop s'attarder sur la psychologie de ses héros. Certains iront même jusqu'à dénoncer quelques passages comme érotiques: "les descriptions qui regorgent de détails piquants et d'érotisme font de ce roman une lecture divertissante. Mais l'auteur a-t-il choisi une bonne méthode en s'occupant des aventures amoureuses d'Irina? Sa méthode est-elle bonne, lorsque la lutte du peuple demeure à l'arrière-plan ?"12 Tous ces arguments et recommandations adressées à Dimov peuvent maintenant nous faire sourire mais c'était des accusations graves à l'époque et l'on ne peut que louer le courage de Dimităr Xadžiiliev qui osa s'élever contre ce chœur bien pensant, au nom de critères plus littéraires13: "Pour conclure, je dirai que malgré tous les défauts qui ont été soulignés, le roman de D. Dimov est véritablement le plus grand événement de notre littérature. On ne peut lui dénier cette grande fresque et cette composition dont rêvent nombre de nos écrivains. Après une seule lecture du roman, on en connaît tous les héros. Si vous me demandez ce qui se passe dans La deuxième division de Pavel Vežinov, je serais incapable de vous citer un seul héros. J'ai lu Le moulin Lipovanski de Stojan Daskalov [critique bien assénée à deux écrivains qui étaient dans la salle et venaient de faire la leçon à Dimov ! M. V-N] et tout est confus dans ma tête, tandis que je me rappelle tous les héros de Dimov, car ce sont des images bien vivantes." Dimov répond et se défend longuement (trente pages), dignement... d'un point de vue marxiste (il n'avait pas d'autre choix), ce qui ne l'empêche pas de taxer franchement Pantelej Zarev de dogmatisme et de subjectivité. Deux semaines plus tard, le présidium de l'Union des Ecrivains décide de ne pas proposer Tabac pour le prix Dimitrov (il l'obtiendra un peu plus tard).
... qui devient une affaire politique. Le roman échappe à son auteur. Ce qui est étonnant, c'est qu'entre temps, Dimităr Dimov avait envoyé son livre au "numéro un" bulgare, Vălko Červenkov et avait reçu de lui, le 1 janvier 1952, en même temps que ses voeux, un message de félicitations: "Cher camarade Dimov, Bonne année (...) De tout cœur je vous félicite pour Tabac. Je vous remercie de me l'avoir envoyé. J'en achève la lecture; je le lis avec une réelle satisfaction, avec une très grande joie pour notre littérature, pour vous et votre succès, camarade Dimov. Je vous serre la main fraternellement. Vôtre, Vălko Červenkov."14 Face à ce témoignage ouvertement chaleureux et favorable du dictateur, comment s'expliquer la réaction qui a prévalu à l'Union des Ecrivains? Certains n'étaient-ils pas au courant de cette lettre? En réalité, comme ils l'avoueront un peu plus tard, ils l'ont tout simplement sous-estimée, considérant qu'il s'agissait d'un témoignage personnel qui n'engageait en rien la position politique officielle à tenir. Cette négligence devait coûter cher à nombre d'entre eux... En mars de la même année, l'affaire est portée au niveau public par Pantelej Zarev - toujours lui - qui publie dans le journal Literaturen Front15, organe officiel de l'Union des Ecrivains bulgares, un article polémique au titre éloquent: "Pour une victoire complète sur les phénomènes anti-réalistes". Il n'y a rien de bien nouveau dans cet article qui reprend les critiques formulées par ses collègues et lui-même: une place trop importante est accordée dans le roman aux héros "négatifs", à leur vie et à leurs amours, on y sent beaucoup trop l'influence de la littérature bourgeoise, il manque une héroïne, du côté des partisans, qui serait le contrepoint d'Irina; quant à la description des ouvrières du tabac, on n'y sent ni la perspective d'avenir, ni la conscience politique, ni la vitalité caractéristiques du prolétariat. En conclusion, rappelant tout de même les qualités plastiques de l'œuvre, P. Zarev encourage l'auteur à recommencer son roman en suivant les recommandations qui lui ont été adressées. Aussi bien P. Zarev que la rédaction du journal qui a laissé passer cet article devaient le regretter amèrement: on assiste à un enchaînement de réactions dans la presse, notamment dans ce même Literaturen Front qui publie une semaine plus tard un article défendant la portée morale et la "pureté" politique du roman, suivi d'un démenti malheureusement tardif: "La rédaction ne partage pas l'avis de P. Zarev concernant le roman Tabac , avis exprimé dans son article "Pour une victoire complète sur les phénomènes anti-réalistes". C'était une erreur grossière que de publier cet article sans commentaire explicite en ce sens. Aujourd'hui, nous publions un article de N. Furnadžiev. Le point de vue de la rédaction sortira dans l'un des prochains numéros de Literaturen Front." Cette réserve prudente, cet attentisme montrent bien la perplexité (et la crainte) qui s'était emparée des esprits. Le coup de grâce est porté par le quotidien Rabotničesko delo16, antenne officielle Comité Central du Parti communiste, qui publie trois jours plus tard un article non signé mais dont on sait maintenant qu'il a été "commandé" par V. Červenkov en personne. Intitulé "Sur le roman Tabac et ses critiques néfastes", il prend le parti du roman mais en en déformant le sens de manière caricaturale (c'était déjà patent sous la plume de N. Furnadžiev, mais plus discret): D. Dimov devient l'apôtre du communisme, qui démasque la classe bourgeoise et le capitalisme, instruments aux mains de l'étranger. Il vaut la peine de s'arrêter un moment sur le ton et les arguments de cet article interprété à l'époque comme rétablissant la vérité et la justice contre la bêtise et le dogmatisme de la critique. Or, c'est une véritable "profession de foi" stalinienne avec les clichés de la langue de bois qui vont de pair (l'étranger comme synonyme d'ennemi, louange de la lutte communiste présentée comme hautement héroïque, exaltation du nouveau monde en train de s'édifier et de l'avenir radieux qu'il prépare pour tous, usage massif d'adjectifs hyperboliques, etc.)17: "Dans ce roman, Dimităr Dimov a dévoilé comme aucun autre auteur bulgare - ni avant ni depuis le 9 septembre 1944 - avec justesse et une grande puissance artistique la décomposition de la classe capitaliste alors dominante. Avec la maîtrise qui s'impose, il a montré la bourgeoisie bulgare apatride et ennemie du peuple, personnifiée par les magnats du tabac, en train de dépouiller le peuple de la manière la plus canaille, de le vendre à l'impérialisme étranger, notamment allemand, dictant aux gouvernements, ces marionnettes, leur politique hostile au peuple et leur terreur sanglante contre les masses laborieuses qui se rebellaient pour défendre leurs droits." Les personnage du roman sont décrits à travers ce prisme déformant, les défauts eux aussi sont passés en revue: langue trop négligée, place insuffisante accordée aux luttes des masses laborieuses, trop de détails sont donnés sur "le camp ennemi" (sic; il est intéressant de noter la gradation de la notion de "héros négatifs" à celle de "camp ennemi"). Mais on ne doute pas que, "dans la seconde édition du roman, manifestement, ces défauts peuvent facilement et doivent [c'est nous qui soulignons - M. V-N.] être corrigés par l'auteur. " En conclusion, il est affirmé que "cette œuvre est l'orgueil de notre littérature." A partir de là, le sujet dévie et l'on a fortement l'impression que l'affaire Tabac était, en réalité, un prétexte commode pour mettre au pas - ou purger - la critique littéraire en Bulgarie, ainsi que l'Union des Ecrivains qui incarne cette dernière. Le blâme est en effet violemment jeté sur Pantelej Zarev, dont les "arguments talmudistes" sont critiqués, ainsi que sur Literaturen Front et l'Union des Ecrivains: "Au cours de trois jours de débats à l'Union des Ecrivains, un grand nombre de nos critiques "autorisés" ont renié Dimităr Dimov avec la légèreté qu'auraient des étrangers à notre littérature et avec une férocité monstrueuse, ils l'ont "pourfendu" à la hache et l'ont "rejeté" dans l'arrière-cour de la littérature, sous le regard perplexe et ahuri du public bulgare taxé d'un seul geste, ni plus ni moins, de public aux goûts pervertis, voire pornographiques." L'article se termine par une incitation - un ordre à peine déguisé - à purger l'Union des Ecrivains de ses éléments considérés comme mauvais (notamment, ceux qui n'étaient pas affiliés au Parti): "Le responsable de ce mauvais état de la critique littéraire est l'Union des Ecrivains bulgares, qui n'a pas pris à temps des mesures pour écarter les tendances talmudistes, sectaires, un goût dénaturé dans notre critique littéraire. Malgré tous les signes manifestes d'échec, au sein des critiques littéraires, ni la direction de l'Union, ni l'organisation du Parti chez les écrivains ne se sont soucié de l'état de la critique. Cette indifférence de leur part perdure. De toute l'affaire qui s'est passée, avec le roman de Dimităr Dimov, l'Union des Ecrivains doit tirer de sérieuses conclusions sur notre critique littéraire et prendre des mesures décisives pour la réorganiser." Lors d'une séance mémorable à l'Union des Ecrivains, la majorité d'entre eux battent leur coulpe et procèdent à leur autocritique, tandis que certains osent réinterpréter favorablement ou renier les paroles acerbes qu'ils avaient prononcées. Bref, dans l'ensemble on s'accordait sur le fait que l'on n'avait pas su voir en Tabac un "instrument pour la lutte communiste" et l'on réitérait à l'auteur le conseil de réécrire son œuvre. Il n’est pas dépourvu d’intérêt de mentionner à nouveau ce qu’écrit Zdravko Dafinov dans ses mémoires sur toute l’affaire, d’autant plus que son avis frappe par sa justesse: "19 mars 1953. Dans le salon rempli à craquer du salon de la Maison des Etudiants a eu lieu une "discussion" sur le roman de Dimităr Dimov, Tabac, en présence de l’auteur, un homme très timide à lunettes, un peu plus âgé que moi. Dans son discours préliminaire, il a reconnu trouver certaines erreurs "idéologiques" dans la première édition de son roman et a affirmé qu’il était décidé de les corriger dans la seconde édition qui doit paraître, en introduisant d’autres héros pour "contrebalancer" les représentants de la société bourgeoise. Manifestement, malgré la bienveillance de Červenkov en personne à l’égard de la première édition de son roman, il lui a été fortement recommandé de renoncer à l’objectivité avec laquelle il avait dépeint la réalité avant le 9 Septembre 1944. Cela a brusquement ravalé l’image morale que nous avions, Ketty et moi, de cet écrivain. Je continue à reconnaître son talent mais je ne puis éprouver de respect pour un homme qui n’a pas de "credo" moral bien établi... Un auditeur d’un âge avancé à dit quelque chose d’intéressant: il a "conjuré" Dimov de ne pas changer un seul mot dans la seconde édition de son roman, et a prédit que s’il le faisait, le roman perdrait sa valeur artistique. Comme il est dommage qu’à des périodes aussi fatales que celle-ci, même les créateurs les plus doués de talent se transforment en hommes faibles, prêts à servir le pouvoir."18 Et enfin, plus tard encore, lorsque sort la seconde édition: "27 juin 1954. La seconde édition du roman de Dimov, Tabac, que je me suis forcé à relire, m’a déçu. Il a utilisé tout l’arsenal des communistes: grèves d’ouvriers, hauts faits des partisans, etc., et a intégré dans son roman de nouveaux héros "positifs" qui se sacrifient pour leurs idéaux prolétariens. Les nouveaux chapitres sont comme des pièces cousues sur un nouveau costume. La composition équilibrée du roman s’en trouve détruite, la ligne narrative diluée, les personnages principaux sont bien pâles, l’intrigue principale devient peu crédible d’un point de vue psychologique... Comme il avait raison, cet homme âgé qui, lors de la discussion sur la première édition du roman, avait conjuré Dimov de ne rien changer ni ajouter! Voilà comment le nouvel auteur de romans bulgare le plus talentueux se détrône lui-même par manque de résistance politique..."19
L'Histoire échappe au roman. D. Dimov s'incline non sans mal, comme en témoignent les mémoires de sa femme, Nelli Dospevska20, qui ne cache d'ailleurs pas ses doutes concernant le succès de la seconde version du roman. Elle cite son mari: "Il est, paraît-il nécessaire que je remanie mon roman? Mais l'aiguillon ne doit-il pas venir de moi-même? N'est-il pas indispensable, avant tout, que je sois moi-même convaincu de ce que je dois faire et de la manière dont je dois le faire?" Il décide de ne pas réécrire l'œuvre mais ajoute environ cent vingt pages, disséminées sous forme de chapitres supplémentaires, consacrées à la classe ouvrière et surtout aux luttes du Parti communiste (pages souvent ennuyeuses, il faut bien le dire). Il crée également l'image de Lila, censée faire un contrepoint ouvrier au personnage d'Irina. Ce dur labeur lui prend pratiquement un an. Sous cette forme, Tabac ressemble plus, il est vrai à un "instrument de la lutte communiste" et en ce sens, on peut affirmer que l'histoire a échappé au roman. Sans entrer dans les détails des difficultés rencontrées - encore une fois - par ce roman, même nouveau (il faut dire que la critique échaudée est maintenant fort prudente), il est intéressant de mentionner la lettre aussi longue (douze pages) qu'émouvante adressée par Dimov à V. Červenkov, pour le supplier d'accepter cette version remaniée mais non entièrement réécrite. La réponse est positive et la nouvelle version sort au printemps 1954, tirée cette fois à vingt mille exemplaires. L'intérêt du public ne se démentit pas, à tel point qu'il paraît une troisième édition (trente mille exemplaires) en 1955. S'il est normal que la critique littéraire, jusqu'en 1989, fasse de Tabac une victoire de la littérature vraie sur le dogmatisme pur et dur, on peut s'étonner que cette vision des faits perdure en général. Il nous semble que la meilleure interprétation est donnée par le critique Tončo Žečev, dans sa postface à la réédition de la première version du roman (1992): "Aujourd'hui, 40 ans après ce qui s'est passé, on peut affirmer tranquillement que dans ce duel inégal, les deux parties ont perdu, qu'elles ont subi un revers. Si cela ne semble pas trop exagéré, je dirais même une catastrophe. (...) D'une part, le coup le plus dur asséné au dogmatisme et au schématisme, à la critique bête et sûre d'elle, venait de l'intérieur. Non pas de camps prétendument bourgeois et ennemis mais de la direction même du Parti (...). Des schémas et des images littéraires élémentaires étaient opposées à d'autres schémas et images littéraires élémentaires. Et c'est cela qui était le plus malsain, le plus absurde, le plus horrible dans la situation pour la critique zélée de l'époque. D'un autre côté, le roman porté aux nues de la littérature classique, gâté par la rhétorique officieuse, n'a pas moins perdu."21 Quant à Albert Benbasat et à Anna Svitkova, ils n'hésitent pas à parler "d'assassinat littéraire".22
Il faut bien conclure: ce qui est intéressant, notamment, dans toute cette malheureuse affaire, c'est que l'on assiste à une triple mise en scène: tout d'abord à une certaine mise en scène de l'histoire dans Tabac, histoire presque contemporaine à l'auteur, telle qu'il la voyait; cette mise en scène, réappropriée et déformée par l'idéologie officielle est une seconde mise en scène qui aboutit à une troisième, la nouvelle version, compromis entre les deux précédentes. En ce sens, il serait dommage de minimiser l'affaire et de n'en faire qu'une anecdote de la vie culturelle bulgare: elle a eu une portée politique et idéologique importante et a donné prétexte à une épuration des milieux écrivains de l'époque. La critique était fustigée, mise au pas, remise sur le droit chemin.
1. Le 14 août 1946 sort "l'arrêté de Ždanov" dirigé contre les deux revues soviétiques Zvezda et Leningrad, et qui vise les écrivains A. Axmatova et M. Zoščenko dont les œuvres sont qualifiées "d'étrangères à la littérature soviétique", "vides", "sans contenu", voire "bourgeoises" et "antisoviétiques". Cet arrêté a eu d'énormes conséquences sur la vie culturelle soviétique ainsi que dans les pays satellites. [en arriere] 2. Tjutjun (Tabac), édition de 1951 rééditée en 1992 par les éditions Trud. [en arriere] 3. Slučajat Tjutjun (L'affaire "Tabac"), présentée par Albert Benbasat et Anna Svitkova, éditions universitaires "Sveti Kliment Oxridski", Sofia, 1992. [en arriere] 4. Front de la Patrie (Otečestven Front): organisation politique créée en 1942 à l’initiative du parti communiste bulgare. C’est elle qui crée le nouveau gouvernement, après le coup d’Etat du 9 septembre 1944. [en arriere] 5. Literatura za 11 klas, Sofia, Prosveta, 1993, p. 19. [en arriere] 6. Ibid. p. 18. [en arriere] 7. Michel Aucouturier, Le réalisme socialiste, Paris, PUF, Que sais-je n° 3320, 1998. [en arriere] 8. Svetoslav Igov, Kratka Istorija na bălgarskata literatura, Sofia, Prosveta, 1996, p. 502. [en arriere] 9. Zdravko Dafinov, "Bouržoazna Bălgaria (1913/1942, Belomorski dnevnik (1942/44), Pod diktaturata na proletariata (1944/56), Bezvremieto na komunizma (1956/89), Razvideljavane (1989/98), Sofia, éd. Rodina, 1998-2000. [en arriere] 10. Zdravko Dafinov, Pod diktaturata na proletariata (1944/56), p. 227. [en arriere] 11. in Slučajat Tjutjun , op. cit., p. 9. [en arriere] 12. Toutes ces citations sont issues de Slučajat Tjutjun , op. cit., p. 11- 45. [en arriere] 13. Slučajat Tjutjun , op. cit., p. 75. [en arriere] 14. Slučajat Tjutjun , op. cit., p. 7. [en arriere] 15. c'est-à-dire "Front littéraire". [en arriere] 16. c'est-à-dire "La cause ouvrière". [en arriere] 17. Slučajat Tjutjun , op. cit., p. 162-169. [en arriere] 18. Zdravko Dafinov, op. cit., p. 259. [en arriere] 19. ibid. p. 288/289. [en arriere] 20. Nelli Dospevska, "Comment on a tenté de détruire Tabac", in Slučajat Tjutjun , op. cit., p. 301-311. Ces mémoires ayant été publiées (dans une version censurée) en 1985, on en imagine le ton et la teneur si l'auteur avait été parfaitement libre. [en arriere] 21. Tjutjun (Tabac), édition de 1951 rééditée en 1992 par les éditions Trud, p. 609-610. [en arriere] 22. Slučajat Tjutjun , op. cit., post-face. [en arriere]
© Marie Vrinat-Nikolov A paraitre dans les actes du colloque "Les mises en scene de l'histoire dans les pays de l'Europe mediane", Paris, INALCO, 27/28 janvier 2000.
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